mercredi 2 novembre 2011

L'homme privé de robe

Salut!

C’est vrais que ça était passé en 2000 mais j’aimerais bien qu’on partage certains idées;-)

Sa robe avocat sur mesure toute neuve sur le bras, Roger Malalou présentait le 18 janvier 2000 à la cour d'appel de Poitiers pour ce qui doit être un des grands moments de sa vie: la prestation de serment. Comme les 19 autres futurs avocats, il est entouré de sa famille et de ses amis; les appareils photo et les Caméscope sont prêts. De plus, on est à la veille de ses 45 ans et les réjouissances qui se préparent sont à la hauteur du double événement.
Dans le ballet des robes noires, rouges et herminées, il repère Me Didier Couret, bâtonnier de l'ordre des avocats de Poitiers. Il le salue. C'est alors que le bâtonnier lui assène: "Il y a un problème pour vous. Le procureur général s'oppose à votre prestation de serment car vous n'avez pas de stage." Autrement dit, Roger Malalou n'a pas signé de contrat de collaboration avec un avocat de la place. Autrement dit, il peut rentrer chez lui. La fête est finie.
La loi avec lui. "On lui a fait tomber la toge avocat devant tout le monde. Pourquoi?", interrogeait Me Christophe Moysan, son avocat, lors de l'audience solennelle de la cour d'appel de Poitiers qui examinait cette affaire. Selon Roger Malalou et son défenseur, les textes qui régissent la profession d'avocat sont clairs: un candidat peut prêter serment dès lors qu'il a été reçu à ses examens du Capa (Certificat d'aptitude à la profession d'avocat); cette formalité est distincte de la question de la collaboration chez un maître de stage. Et un arrêt rendu par la Cour de cassation le 13 octobre 1999 les a encore clarifiés: "...La prestation de serment, acte différent de l'inscription au stage, n'impose pas au postulant la justification d'une quelconque promesse de stage."
Conforté par le récent arrêt de la Cour de cassation, Roger Malalou dépose son dossier au conseil de l'ordre le 22 novembre 1999. Le conseil se range à ses arguments et le présente à la prestation de serment. "La Cour de cassation me paraît avoir réglé la question de la manière la plus claire qui soit: les deux formalités doivent être dissociées", réaffirmait le bâtonnier devant la cour.
2000 demandes de stage. L'avocat général, lui, persiste à trouver matière à interprétation. Certes, il se dit "navré" de la façon dont Roger Malalou a été informé de la décision du procureur général et lui présente les excuses de l'institution. Malgré tout, il soutient qu'il doit y avoir concomitance entre prestation de serment et prise de fonctions. En invoquant, au final, une raison plus économique que juridique: "Le serment sera démonétisé si on le prête, comme ça, à toutes fins utiles, sans qu'il ait un lien immédiat avec une activité professionnelle.".
Roger Malalou, d'origine congolaise, est de nationalité française et vit depuis vingt-cinq ans à Poitiers. Or, sur 180 avocats, bien sur avec leurs robes avocats,inscrits au barreau de Poitiers, seulement 4 sont d'origine étrangère. "Pourquoi ne trouve-t-il pas de stage ? Pour des raisons économiques", lance d'abord Me Moysan, qui profite de l'occasion pour dépeindre des cabinets en crise, asphyxiés par un taux de TVA prohibitif. "Mais aussi parce qu'on ne sait pas intégrer les avocats d'origine étrangère, parce que certaines clientèles n'en veulent pas. Il faut changer les mentalités."
Le "comité de soutien" à Roger Malalou écoute. Parmi la vingtaine de ses membres, un médecin, un chirurgien, un chimiste, un docteur en biologie. Tous Africains d'origine. Ils se sont sentis insultés par l'épisode du 18 janvier et seront très attentifs à la décision qui sera rendue le 3 juillet.

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